LES RESTRICTIONS BUDGÉTAIRES ESCOMPTÉES DE L'ALLIANCE PRO
Par Mickaël Ciccotelli | 10/11/2016
A plusieurs reprises, BI&T a tenu ses lecteurs informés des développements récents de la constitution de l'Alliance professionnelle. Après avoir mis la main sur un document issu du groupe de travail oeuvrant à la finalisation de ce regroupement, nous sommes en mesure de faire état de son futur fonctionnement probable. Aujourd'hui, cap sur ses aspects budgétaires généraux.
La situation budgétaire actuelle
En 2015, le budget de fonctionnement pour la retraite complémentaire de Pro-BTP, B2V, Audiens et Lourmel, les quatre futurs membres de l'Alliance Pro, a atteint 210 millions d'euros. Ce budget sert majoritairement, à 63 % soit un peu plus de 132 millions d'euros, à financer des dépenses de personnel. L'an passé, les quatre IRC employaient ainsi 1726 ETP. Les 37 % restants, soit un peu moins de 78 millions d'euros, ont financé les frais généraux - dont 55 millions pour les frais généraux non informatiques. En termes d'activités retraite, les 210 millions d'euros financent à environ 45 % des processus "entreprises" et à 55 % des processus "particuliers".
Pour les partenaires sociaux et les services en charge de la constitution de l'Alliance Pro, ces grands équilibres constituent autant de repères "permettant de prévenir une déformation anormale des différents postes de dépenses dans la scénarisation économique" du projet.
Une "demande" de travail en baisse
D'après les calculs des négociateurs, sur la période 2016-2022, malgré une "demande" en termes de services retraite estimée stable du côté des particuliers et des entreprises, le "niveau de demandes d'unités d'œuvre exprimé en volume" devrait diminuer significativement. Autrement dit, les promoteurs du regroupement professionnel misent sur une hausse conséquente de la productivité des agents.
Selon eux, elle sera permise d'une part par la "simplification du produit retraite", résultant du regroupement des adhésions multi-GPS, de la mise en place de la DSN, de la simplification du processus de recouvrement des cotisations, de l'interlocution aux actifs et du regroupement des polypensionnés. D'autre part, elle proviendra du "selfcare" défendu par l'AGIRC-ARRCO, visant à transférer aux particuliers certaines charges de travail incombant actuellement aux IRC - par exemple, la modification en ligne du RIB ou de l'adresse, voire la rectification des carrières.
Au total, dans une France vieillissante, où les retraités sont de plus en plus nombreux, l'AGIRC-ARRCO assure que les IRC connaîtront une baisse d'activité de l'ordre de 4 à 5 % d'ici 2022. Cette baisse sera intégralement répercutée en termes de dotation aux IRC : les quatre membres fondateurs de l'Alliance Pro escomptent entre 8 et 10 millions d'euros de moins, soit 50 à 60 ETP "gestionnaires". Et de une !
Les "contributions" de l'Alliance
L'Alliance Pro n'étant pas mise en place dans le seul objectif de comptabiliser les baisses de dotation de l'AGIRC-ARRCO, ses fondateurs mettent également en avant ses "contributions" à la baisse du budget de la gestion des retraites complémentaires. D'après ces derniers, le regroupement devrait se traduire par des "synergies dans les activités métier et support", "une diminution de charges [informatiques] par transfert d'activités au GIE AGIRC-ARRCO" et enfin une facilitation de "l'effort de rationalisation [des] frais généraux". Autrement dit : les ceintures vont être serrées à tous les étages.
Le bilan prévisionnel global des restrictions budgétaires attendues spécifiquement de l'Alliance Pro s'avère plutôt ambitieux. A l'horizon 2022, elles représenteraient entre 28,5 et 31,3 millions d'euros dans le scénario le plus minimaliste, reposant sur une augmentation du point d'indice et une diminution de 10 % des frais généraux, et entre 39,6 et 44,4 millions d'euros dans le scénario le plus optimiste, supposant une stagnation du point d'indice et 15 % de réduction des frais généraux.
Pour ce qui concerne les conséquences en termes d'emploi de la constitution de l'Alliance Pro, entre 308 et 353 ETP seraient supprimés, soit entre 18 % et 21 % des effectifs actuels des IRC. Dans un prochain article, BI&T vous présentera, de manière plus détaillée, les chiffres par types de fonction. Quoiqu'il en soit, les salariés de Pro-BTP, B2V, Audiens et Lourmel risquent fort d'apprécier à leur juste valeur les "contributions" de l'Alliance Pro à la rigueur budgétaire...
Quelles restrictions aux restrictions ?
D'après les promoteurs du regroupement professionnel, les restrictions budgétaires seront limitées de deux manières. D'une part, ils évaluent que, d'ici 2022, la constitution de l'Alliance aura un coût de 14 millions d'euros, soit 2 millions d'euros par an. Plus encore, après 2022, ils estiment "l'impact récurrent annuel" du regroupement à 3 millions d'euros.
D'autre part, comme ils l'assurent eux-mêmes, "il va sans dire" - mais c'est, certes, toujours mieux de le dire... - que la "promesse professionnelle faite au client" ainsi que "l'autonomie politique des groupes à l'intérieur de l'alliance" seront préservées. Qui en aurait douté ?